12
Après quelques essais infructueux, les deux récentes amies réussirent à planifier une escapade en ce samedi de la mi-décembre.
L’informaticienne avait dû faire acte de présence auprès de ses parents au cours des dernières fins de semaine. Son père ayant été hospitalisé, sa mère avait fait appel à sa fille pour s’assurer de son support. Depuis, le papa avait retrouvé la forme et la maman reprenait un quotidien relativement normal avec son complice de toute une vie. Par ailleurs, ses heures de travail avaient maintes fois débordé du cadre régulier et ses collègues l’avaient réservée pour les sorties du jeudi soir, auxquelles elle n’avait pu apposer un droit de refus.
La psychologue avait terminé son marathon de bénévolat. Son implication dans l’organisme en santé mentale avait raflé la majeure partie de son espace loisir. Heureusement, la soirée tango avec son père lui avait accordé une détente appréciée.
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Pour cette première sortie, Isabelle et Marie adoptèrent un programme diversifié. Esquisse de magasinage en début d’après-midi, visite au Musée pour une exposition sur les Impressionnistes et souper dans un petit resto au menu traditionnel français. Ainsi, l’atmosphère des Monet, Renoir, Degas se prolongerait au-delà de leurs pinceaux : les mets de leur patrie en seraient le complément.
Aux portes tournantes de cette grande surface du centre-ville, une affluence de consommateurs s’y bouscule. Au rayon des parfums, Marie repère rapidement Isabelle, enveloppée dans un manteau au bleu éclatant. Avec exubérance, elles se donnent la bise au point que quelques têtes souriantes se retournent.
Elles déambulent nonchalamment d’un étalage à l’autre et Isabelle manifeste sa fascination pour cette ambiance des Fêtes, suscitée par les mélodies et les nombreuses décorations. C’est alors que Marie s’agrippe à son bras et se prépare à lui soumettre son invitation.
Auparavant, elle avait pris soin de partager avec sa mère cette récente amitié avec Isabelle. Elle avait amené sur le tapis son souhait de l’introduire dans la famille lors de la soirée du 31 décembre et désirait obtenir son avis sur ce point. Après quelques secondes d’hésitation, Michelle avait répondu que l’occasion serait toute désignée pour intégrer Isabelle dans le clan Lompré. Malgré l’aval de Michelle, Marie restait perplexe. Il lui avait semblé qu’elle se distanciait de l’enthousiasme de sa fille ; comme si elle craignait que Marie ne vive éventuellement une déception. Et puis, pourquoi son père lui avait-il conseillé d’en parler elle-même à sa mère ? Cesse de te tourmenter sur ce qui n’existe probablement pas !
— Isabelle, que dirais-tu de te joindre à ma famille pour fêter le 31 décembre et ainsi souligner le début de la nouvelle année ? Ce serait un réel bonheur pour moi que tu rencontres mes proches.
Isabelle, interloquée, fixe son amie et après ce qui peut sembler être une hésitation, lui répond avec émotion.
— Merci... merci Marie. Bien sûr que j’accepte avec une grande joie. » Elle prend Marie dans ses bras et la remercie de nouveau. « Tu ne peux savoir le plaisir que tu me fais. Connaître la grande famille de mon amie, ce sera extraordinaire. Ce n’est pas un secret si je te dis qu’à l’approche des Fêtes, mon frère me manque davantage. Alors me retrouver dans le clan Lompré, pour reprendre ton expression, me fera chaud au cœur. Je suis vraiment touchée, Marie. Je ne trouve pas les mots pour t’exprimer toute ma gratitude de cette belle invitation. »
— Donc, le 31 décembre, rendez-vous chez mes parents et nul doute que cela passera à l’histoire !
Marie enserre davantage le bras d’Isabelle et lui communique son bonheur de savoir qu’elle fera dorénavant partie des siens. Sur ces entrefaites, Michelle surgit devant elles, comme une apparition de la Vierge Marie.
— Maman ! Quel beau hasard de te voir ici. Laisse-moi te présenter ma grande amie, Isabelle.
— Ravie de faire votre connaissance Isabelle. » Michelle lui tend une main ferme et elle en déduit que cette jolie femme incarne probablement la raison de sa propre inquiétude et de la jovialité de sa fille.
— Je suis vraiment heureuse de vous rencontrer.
— Maman, je viens tout juste d’inviter Isabelle pour notre 31 décembre et... elle accepte ! Je ne serai pas seule cette année.
— Ça me fait tellement plaisir, madame Lompré. J’ai hâte à cette grande fête familiale.
— Nous serons tous enchantés de vous recevoir, Isabelle.
Après avoir échangé quelques banalités, Michelle met fin, de façon élégante, à cette intrusion involontaire.
— Je ne voudrais pas vous retarder ; alors, je vous laisse à votre magasinage et au plaisir de vous accueillir prochainement, Isabelle. » Sur ce, elle embrasse Marie et fait de même envers son amie.
— À bientôt, maman !
— Nous nous reverrons sous peu, madame Lompré.
Les deux filles poursuivent leurs bavardages au travers des allées et finalement se rendent compte qu’il est plus que temps de se diriger vers l’objectif de leur déplacement. Aussitôt, elles s’emmitouflent dans leurs manteaux et affrontent un froid, disons-le, plutôt glacial.
Isabelle n’avait jamais franchi le seuil de ce musée à l’architecture imposante. Elle a l’impression de s’ouvrir à un nouveau monde, car bien humblement, elle se qualifie de totalement néophyte dans le domaine des arts visuels. Il lui semble que sa vie ne fut entourée que de mathématiques et de logistique.
Marie suggère de suivre l’exposition à l’aide de l’audioguide ; ce qui facilitera l’apprentissage d’Isabelle. Cette promenade, dans un siècle pour ainsi dire étranger, revêt un caractère mystérieux et dégage une intimité intellectuelle. Isabelle apprécie ces nouvelles connaissances et Marie constate qu’elle pourra dorénavant partager cet attrait artistique.
Au terme de la visite, la satisfaction de l’une et l’enchantement de l’autre ajoutent une note de complicité entre les deux amies. Le musée devient leur première connexion culturelle. Dans leur for intérieur, pendant qu’elles marchent silencieusement vers le bistro français, chacune imagine, à sa façon, l’ascension progressive de leur amitié. Rien ne presse. Car elles entrevoient que désormais, elles se suivront jusqu’à la fin de leurs jours.
13
«Notre vol Alger-Paris est maintenant arrivé à destination. Pour tous les passagers en correspondance vers les États-Unis ou le Canada, veuillez récupérer vos bagages et procéder de nouveau à l’enregistrement de votre prochain vol. Nous vous remercions d’avoir voyagé avec... » François n’écoute plus et attrape son léger bagage à main. Il a le vent dans les voiles ou plutôt il se sent des ailes, ce serait plus de circonstances !
À l’aéroport, une fourmilière de passagers déambule à une cadence effrénée. Bagage en bandoulière, François se trace un chemin à travers cette cohorte humaine. Après avoir vérifié l’heure d’embarquement de son vol de correspondance, il évalue le temps à sa disposition dans le but d’effectuer ses achats de Noël.
Exceptionnellement, cette année, il a décidé de transgresser la consigne familiale. La liste imprégnée dans sa tête, il se met en mode marathon et part à l’assaut de ses trouvailles. Un Calvados pour son père, une saga historique pour Michelle, une montre branchée pour Alexandre, des chocolats fins pour Karine, un pashmina en soie pour sa sœurette, des jeux de société pour les deux frérots, des savons Dior pour les belles-sœurs et de juteux bonbons pour les neveux. Les achats sont maintenant finalisés. Il a gagné sa course contre le temps. À tel point qu’il peut se permettre de flâner un peu. Malgré le bagage devenu un peu lourd, il n’a pas le goût de s’asseoir dans les fauteuils inconfortables. Il décide de se balader et adopte un rythme contraire à la foule. Il se fait bousculer, accrocher, tasser. Qu’importe ! Il est au ralenti et il le savoure !
Les décorations de Noël scintillent et les vitrines d’or et d’argent jouent en abondance la carte des Fêtes. Elles brillent de tous leurs reflets luxueux. Une première fois, il s’y immobilise en s’attardant plus spécialement aux bracelets. Puis un deuxième arrêt et un dernier. Il réfléchit à l’absurde. S’il était en amour, qu’achèterait-il à sa douce ? Assurément, un de ces beaux bracelets. Il le lui offrirait dans un écrin de rêve, en improvisant une soirée romantique aux chandelles et mots tendres. Tu es fou, François Lompré. Tu ne fais vraiment pas dans le genre. Tu te racontes des sornettes !
Au moment de tourner le dos à toutes ces parures, un bracelet en particulier retient son attention. Ses yeux ne cessent de le fixer. Il n’en fallait pas plus pour qu’une dame s’empresse de le prendre en otage. Le bijou, bien étalé sur son présentoir, bascule déjà dans ses mains. La commerçante l’abreuve de maints détails et insiste sur la finesse des motifs incrustés dans ce cercle doré. Il acquiesce.
— Oui, en effet.
Ne lui laissant aucun répit, elle enchaîne.
— Comme votre bien-aimée a de la chance, monsieur. Je vous félicite pour votre bon goût. Elle sera comblée !
François argumente dans sa tête, cherche ses mots, hésite et finalement s’entend répondre :
— Oui. Ce sera parfait.
Elle le scrute des yeux et ajoute :
— Mon intuition me trompe rarement. Je crois que vous êtes profondément amoureux.
François se surprend à esquisser un sourire convaincant. Il présente sa carte de crédit tout en consultant sa montre. Pendant que la vendeuse procède à la facturation, une jeune fille aux mains habiles s’active à décorer joliment le petit paquet. Au moment de lui remettre son achat, la dame conclut :
— Nous vous souhaitons de Joyeuses Fêtes, Monsieur, et surtout... profitez pleinement de votre bonheur !
Il lui semble que de longues minutes viennent de s’écouler. Il se réveille subitement. Pas le temps de s’arrêter à cette folie. Plus tard, on analysera. L’avion. Vite, il s’empresse et répète le marathon, mais, tout à fait autre celui-là. Pendant sa course vers la porte d’embarquement, il entend son nom à l’interphone. « Le passager François Lompré est prié de se présenter à la porte 42. Dernier appel. » Oui, oui, j’arrive, attendez-moi !
La respiration haletante, le cheveu défait, la lunette glissante, le bagage pendant, il se présente à l’agent de bord. Avec raison, on le réprimande et il se confond en excuses. Dès son entrée dans l’appareil, de gros yeux redoutables le reçoivent et une maladresse involontaire s’empare de lui. Il se sent vraiment comme un gamin pris en faute extrême.
Il repère facilement le seul siège inoccupé, range son sac bourré dans le compartiment assigné, salue ses deux compagnons de voyage qui affichent un petit air moqueur, s’assied et tente de retrouver son souffle extérieur et... intérieur. Maintenant qu’il est assuré de parvenir à sa destination montréalaise, il respire et revient en mode bracelet. Tu es dingue François Lompré, complètement dingue ! Mais qu’est-ce qui t’a pris ? Acheter ce bracelet en n’ayant personne à qui l’offrir ! L’autre François rétorque : Tu as seulement devancé les événements. La dame t’a bien mentionné que tu étais amoureux, n’est-ce pas ? Alors, sa certitude devrait présager de ton avenir. Il n’y a pas que ton fils qui a le droit de rencontrer l’amour de sa vie ! Pendant que les deux François se livrent bataille, l’avion amorce son décollage et le Québec deviendra réalité dans quelques heures.
Ses deux voisins se présentent, spécifiant qu’ils reviennent d’un séjour de quatre mois à Toulouse, pour un échange professoral universitaire. François emboîte le pas et leur mentionne que, depuis un peu moins de deux ans, son port d’attache est situé en Algérie, dans la région de Kabylie, pour un projet de chemin de fer. Là semble s’arrêter leur prologue.
Mais au fur et à mesure que les agents de bord s’affairent à servir le champagne, gracieuseté de la compagnie en cette veille de Noël, les deux compères se tournent vers François et entament la conversation. Avec un plaisir non dissimulé, ils lui démontrent leur enthousiasme suite à cette expérience universitaire et ne tarissent pas d’éloges à l’égard de cette France si typique. Tout au long du repas arrosé d’un bordeaux très apprécié, le récit d’anecdotes et de mésaventures se succède et François finit par y mettre son grain de sel. En leur racontant, avec humour, les embrouilles involontaires dues aux différences de mentalités en Algérie, il réussit à soutenir la curiosité des deux voyageurs tout en les faisant rigoler. Lorsque le café et les mignardises aboutissent sur leur plateau, tant de souvenirs partagés les ont assouvis et ils passent à l’étape sérieuse des évaluations et opinions sur leur pays d’adoption temporaire, pour terminer avec leur Québec !
Pour le restant du trajet aérien, chacun rentre dans sa bulle et le silence ronronnant remplace les conversations animées. François observe ses compatriotes aux yeux fermés et se dit que la loquacité de ses voisins aura servi à le calmer et à l’amener dans une galaxie, ma foi, plutôt distrayante.
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En fouillant dans son passé de voyageur, il se rappelle son adolescence et se remémore son tout premier départ de la maison familiale en vue d’un circuit dans l’Ouest canadien, organisé par son école secondaire. À 16 ans, ce périple concrétisait son rêve de gamin, car les Chemins de fer en représentaient le thème central. Lorsqu’on lui avait confirmé sa participation à cette odyssée, son obsession de voir enfin défiler les trains en spirale l’avait tenu éveillé pendant plusieurs nuits.
Arnaud ! Soudain, son visage espiègle lui apparaît ; un peu plus et il entendrait son rire éclatant. Qu’advient-il de lui maintenant ? Ce voyage étudiant, dont une moitié était composée de Québécois et une autre de Français, lui avait fait connaître ce Parisien curieux et divertissant. Après trois jours de vie communautaire, ces deux-là semblaient s’être liés à jamais. À jamais ! Quel terme rempli d’espoir et d’illusion !
Tout de même, cette expédition leur avait permis de partager moult commentaires, d’engager de féroces discussions et de défendre avec ténacité leurs opinions respectives. Car, malgré leur jeune âge, les deux compagnons démontraient un réel intérêt pour les diverses actualités et le monde entier les passionnait !
Arnaud avait pris part à cette traversée étudiante en vue de prendre une décision sur son éventuel choix en ingénierie. Finalement, à son retour à Paris, il avait conclu qu’il changerait de cap pour épouser le Droit. D’ailleurs, sa facilité d’élocution, son sens de l’analyse et de l’argumentation ainsi que son côté détective auguraient fortement une profession à tangente « libérale ». Exit l’ingénieur français, bienvenue l’avocat parisien !
Quelques années s’étaient écoulées au cours desquelles les deux compères entretenaient régulièrement un lien épis tolaire. Puis un jour, Arnaud annonça à François qu’un héritage inattendu lui permettrait une petite virée d’une semaine à Montréal. Serait-il prêt à l’héberger... ou plutôt ses parents ? À cette nouvelle, tout un branle-bas s’était déclenché dans la famille Lompré. François avait mis au programme une imposante réception d’accueil et une fête de départ non moins grandiose. Entre ces deux événements, la tournée de Montréal et ses environs ne leur laisserait pas de temps mort, assuré ! Arnaud le Français se souviendrait à vie de son séjour chez François le Québécois. Ce fut le cas... mais pas de la manière prévue.
À l’arrivée d’Arnaud, une multitude de gens fourmillait dans la maison des Lompré. Les camarades de François avec leurs petites amies, Sylvie – déjà dans la vie de François – avec son lot de copines, les amis des amis et bien sûr toute la famille Lompré au complet incluant oncles, tantes, cousins et Hélène, l’unique cousine du clan. Bref, plein de jeunes femmes entouraient ce charmant Parisien.
Coup de foudre ! Malaise ! Arnaud et Hélène. La jolie rousse avait magnétisé le bel étranger. Malgré leur retenue afin que ne soit pas décelée leur attirance mutuelle, quelques fins observateurs perçurent tout de même leurs regards envoûtés. Qu’à cela ne tienne, ce feu de paille ne se rendrait sûrement pas sur l’autre continent.
Le lendemain de cette première fiesta organisée en son honneur, Arnaud avait fait promettre à François de ne pas insister pour venir le reconduire à l’aéroport. Il préférait prendre une voiture taxi, histoire de pouvoir profiter d’une certaine solitude et savourer pleinement ses dernières minutes dans le décor montréalais. François avait obtempéré, car il saisissait bien ces moments de rêvasserie de son ami.
Le programme touristique que François avait soumis à son copain s’était déroulé agréablement, tel que planifié. Finalement, peut-être que cet attrait entre Hélène et Arnaud s’était refroidi de lui-même.
La soirée d’adieu, organisée à l’intention d’Arnaud, avait été orchestrée par la même population joviale et cette fois, il n’y avait eu aucun signe d’alerte amoureuse. En se revoyant, Hélène et Arnaud semblaient très heureux mais sans plus. Des heures de plaisir, de rires, de musique, comblèrent le jeune Français. Les analystes de la première fête pouvaient aller se rhabiller, car il ne pouvait y avoir anguille sous roche.
Par déduction, François finit par découvrir le subterfuge de son copain mais beaucoup plus tard. Arnaud avait si bien préparé sa stratégie concernant l’aéroport que François n’avait rien eu à redire tellement son argument lui avait paru valable. Il reconnaissait bien là son aptitude à convaincre même un Thomas ! Mais il s’avoua qu’il avait peut-être fait preuve de naïveté ou d’un trop-plein de pudeur qui l’avait empêché d’enquêter sur les émotions d’Arnaud envers sa chère cousine.
Dès les premiers instants, Hélène et Arnaud s’étaient compris. S’ils désiraient se revoir, il leur fallait brouiller les pistes et ne pas éveiller les soupçons. Alors, à la fin de cette première soirée, complètement envoûté, Arnaud avait réussi à soumettre son plan et, en catimini, avait transmis à Hélène les détails sur son horaire de retour. La veille de son départ, au cours de la fête, Hélène lui avait indiqué sur un bout de papier l’endroit où il pourrait la rejoindre avec le taxi. Elle l’accompagnerait à l’aéroport et en attente du vol d’Air France, ils se retrouveraient enfin seuls à deux. Le battement de leurs cœurs confirmerait s’il y avait bien secousse sentimentale entre eux.
L’envolée de l’histoire Hélène-Arnaud s’était scellée au terminal d’Air France. Jusqu’à la dernière seconde autorisée, ils s’étaient dits, promis, jurés, engagés. Leur fougue, leur ardeur, leurs regards, leurs étreintes, tout était bonheur et tout était souffrance. Ni la distance ni le temps ne viendraient à bout de leurs sentiments. Hélène rejoindrait Arnaud à Paris. Leur décision ouvrait la porte à l’irrévocable !
C’est ainsi que François avait perdu un copain apprécié. Tante Johanne et oncle Éric avaient été amputés de leur fille. Sa sœur Marie avait été abandonnée par sa grande amie. Mais Arnaud, lui, avait gagné le cœur d’Hélène et le conte de fées raconte que le bonheur leur tiendrait toujours la main. N’est-ce pas une belle histoire malgré tout ?
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Quels souvenirs ! Tout en se dégourdissant les jambes dans son espace restreint, François émergeait de cette planète jadis connue en se retrempant dans ce passé presque ostracisé. La voix du capitaine le ramène à la réalité. Sur un ton jovial, on annonce le début de la descente et on informe les passagers que la température de Montréal indique moins dix degrés Celsius avec quelques flocons. Il est précisément 17 h 15.
Le débarquement se déroule dans un brouhaha enthousiaste, l’attente aux douanes s’opère dans un délai acceptable et après une dernière salutation à ses compagnons au carrousel des bagages, François s’oriente prestement en direction des voitures taxis et une foule semble le suivre dans la même voie. Cela devient évident qu’en ce 24 décembre, il n’est pas le seul à effectuer un retour au bercail ! Qu’importe, plus rien ne presse dans le fond.
Il respire une grande bouffée d’air froid, laisse glisser quelques brins de neige sur son visage et se réjouit de tous ces bruits d’automobiles, de klaxons, de cris de retrouvailles et savoure la joie de revenir dans sa ville ou ce qu’il en reverra bientôt. Après quelques heures dans le ciel, il continue de flotter dans les nuages. L’euphorie, quoi !